Photo of Adele Blair on a camel in Jordan.
Adele Blair à dos de chameau en Jordanie

Je ne l’ai pas vue venir

Mais la vieillesse m'est tombée dessus!
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lle est arrivée lentement, graduellement, juste à ma retraite à 71 ans après deux carrières consécutives remplies de motivation et de passion au service des enfants.

Aucun retour en arrière n’est possible, pas de demi-tour, pas d’échappatoire aux sentiments complexes qui nous accompagnent au long de la route vers cette destination inéluctable. J’ai bourlingué aux quatre coins du monde et adoré chaque expérience, mais je n’étais pas sûre que j’allais aimer ce voyage.

J’ai peut-être d’abord ressenti cette inquiétude en célébrant mes 70 ans, un tournant important. Les blagues reçues par courriel et les cartes d’anniversaire caractérisaient les femmes de mon âge comme étant des petites vieilles ratatinées, courbées, avec des seins affaissés et des jambes maigres, agitant leur canne au-dessus de leur tête, avec des commentaires sur le Botox ou l’incontinence urinaire.

Ou bien c’est lorsque je me suis fait appeler « Ma chère » ou « Ma p’tite dame » pour la première fois par une vendeuse d’une vingtaine d’années.

Ou bien encore, ça pourrait être les publicités ciblées visant à attirer mon attention sur des résidences pour personnes âgées ou des boutiques locales vendant de chics déambulateurs, sur comment obtenir de bons soins à domicile ou choisir un avocat pour préparer mon testament. Évidemment, je devrais m’occuper de tout cela avant que les problèmes de démence ne se manifestent le week-end après avoir reçu ma montre en or lors de ma petite fête de départ à la retraite comme directrice générale d’un hôpital, associée principale d’un cabinet d’avocats ou directrice de l’éducation pour un conseil scolaire de l’Ontario!

Photo of Adele Blair graduating with her daughters, and a photo of Blair in Jordan.
À gauche, une journée spéciale avec ses filles Michelle et Jennifer en 1983; ci-dessous, Adele en Jordanie, l'un des 36 pays visités.

Les stéréotypes systémiques renforcent les idées négatives sur le vieillissement, et celles parmi nous qui arrivent à sa porte et qui sont contraintes de la franchir pour se joindre aux autres peuvent vous dire que ce n’est pas réconfortant.

Les stéréotypes négatifs à l’endroit des femmes âgées influencent la façon dont les professionnels nous traitent – et sur notre façon de nous voir – ce qui peut mener à l’isolement, à la solitude, à la dépression et à des modes de vie malsains. Lorsque les femmes plus âgées sont présentées partout comme étant de « petites vieilles », nous créons dans les faits cette réalité et devenons le portrait que la culture brosse de nous. 

Les femmes de ma génération se sont battues pour recevoir une meilleure éducation. Pour le droit de choisir le nombre d’enfants que nous étions prêtes, disposées et aptes à avoir. Pour un salaire égal à travail égal. Mais, de toute évidence, notre combat n’est pas terminé.

Photo of Blair on a bus trip to South Africa. And Blair with Larry Jones, dress up night on a cruise, 2018.

Nous devons éliminer les images et les stéréotypes utilisés pour caractériser les femmes plus âgées. Nous devons dire aux gens que nous nous sentons insultées lorsque l’on s’adresse à nous dans un langage enfantin ou d’une voix aiguë comme si nous étions des fillettes. Nous devons nous assurer que les plus jeunes savent que nous n’aimons pas nous faire appeler « ma chère » ou que l’on nous décrive comme « un petit couple charmant ».  

Nous devons changer le discours et reconnaître ce qui est manifestement évident : les femmes plus âgées sont accomplies, par exemple elles voyagent partout dans le monde – seules ou accompagnées, s’entraînent et font des marathons, enseignent l’anglais aux étudiants chinois lors de cours d’été, et suivent et donnent des cours de Zumba dans leurs centres communautaires locaux.

Nous devons dissiper le mythe voulant que les femmes plus âgées soient physiquement peu attirantes et qu’elles ne doivent pas avoir de relations amoureuses. Nous devons combattre l’humour, le langage et les commentaires désobligeants, insultants, méchants, vulgaires et sexistes, et plutôt célébrer les femmes plus âgées pour leur esprit, leur charme et leur style, ainsi que pour leur contribution à la création d’un monde meilleur et plus équitable pour tous.

Nous devons changer le discours et reconnaître ce qui est manifestement évident : les femmes plus âgées sont accomplies.

Je suggère de cesser de traiter les femmes plus âgées de « petites vieilles », de « vieilles chouettes » ou de « senior ». Je propose un nouveau terme qui rend hommage à notre force, notre sagesse, notre énergie, notre valeur pour la société et, oui, à notre charme.

J’aimerais que l’on parle de moi comme d’une « femme classique » ou d’une « femme d’héritage », ou selon des termes qui célèbrent mon expérience de vie et mes cheveux gris, mes paupières flétries et mes rides d’expression, et qui reconnaît que je suis encore séduisante et que je peux me sentir sexy et désirée par mon partenaire.

Je n’ai jamais vu venir la vieillesse. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle me tombe dessus aussi vite. Mais mon espoir est que la locomotive des changements culturels nécessaires pour combattre l’âgisme pour les femmes classiques se mette en branle sans tarder, car c’est un train que je ne veux pas rater.

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Photo of an elderly person with their hands in their lap.
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