Je suis née et j’ai grandi à Toronto, et j’y ai enseigné pendant des années. J’avais exploré presque toute la magnifique région des chalets en Ontario, mais je n’avais jamais vu une montagne ni un océan — j’étais trop occupée et trop hésitante pour voyager pendant ma carrière. Puis en 1997, à presque 60 ans, devenue grand-mère, retraitée, veuve et mini-agricultrice, ma réticence à voyager s’est envolée lorsque les animateurs de radio Paul et Carol Mott ont invité les auditeurs à se joindre à eux pour une croisière en Alaska.
La simple idée de partager une cabine avec un étranger m’a fait retarder ma réservation. Mais Pat, mon amie de toujours, m’a dit qu’elle adorerait m’accompagner parce que son mari avait déjà fait cette croisière. Lorsque nous avons traversé le Canada en avion pour monter à bord du Nieuw Amsterdam qui était amarré à Vancouver, j’avais les yeux grands ouverts devant toutes ces nouveautés qui s’offraient à moi.
La croisière a dépassé toutes mes attentes. Les excursions d’une journée à terre étaient formidables : d’abord, un train au départ de Skagway, en Alaska, nous a emmenées en haut d’une montagne jusqu’au Yukon, en passant par le territoire de la ruée vers l’or; ensuite, un hélicoptère au départ de Juneau, en Alaska, nous a transportées jusqu’à un glacier, vêtues d’une tenue semblable à celle des astronautes.
J’ai adoré toute l’expérience de la croisière. Pendant le vol de retour depuis la Colombie-Britannique, je me suis dit : « Mes deux filles ne devraient pas attendre d’avoir 60 ans pour voyager; je vais demander à chacune d’elles où elle aimerait aller. »
Ce tout premier voyage m’a incitée à économiser, à me passer de certaines choses et à planifier un voyage à l’étranger au moins une fois par an pendant les 23 années suivantes — parfois seule, parfois avec des amis, et souvent avec mes filles et ma famille. Cependant, mes voyages les plus mémorables ont eu lieu au Canada.
Une année, j’ai conduit vers l’ouest jusqu’à Prince Rupert, en Colombie-Britannique, toujours avec ma chère amie Pat. Une autre année, mon amie Doreen était ma passagère lors d’un voyage vers l’est jusqu’à la piste Cabot. (Leçon apprise lors de cette aventure : réservez, ou il se peut qu’il n’y ait plus de place à l’auberge. Essayez donc de dormir dans une voiture avec peu de commodités!)
Nous avons surligné sur une carte tous les itinéraires empruntés et les lieux visités. Cela m’a donné un excellent aide-mémoire de tous mes voyages sur lequel je me penche souvent. En examinant cette carte, je me suis rendu compte que je n’étais pas encore allée sur la côte nord du Canada, l’Alaska étant américain. L’Arctique n’est peut-être pas la destination la plus incontournable, mais pour mieux connaître le Canada, il me semblait indispensable de m’y aventurer.
Il y a quatre ans, en faisant des recherches en ligne, j’ai trouvé une compagnie d’expédition locale et familiale qui organisait des croisières dans l’Arctique. Le voyage comprenait l’hébergement en cabine, tous les repas, les divertissements, des conférences données par des experts dans divers domaines et des excursions sur des Zodiacs en caoutchouc avec des guides professionnels. Exactement ce que je cherchais!
Et c’est ainsi qu’en 2017, l’année de mes 80 ans, j’ai plongé du navire Ocean Endeavour dans le détroit de Davis (à l’est de l’île de Baffin, en direction du Groenland)! C’était exaltant, surtout après le passage au sauna en remontant à bord.
Ce navire de 200 passagers et son personnel sont rapidement devenus comme un chez soi et une famille. Des conférenciers ayant une expertise locale en archéologie, en géologie, en géographie, en botanique, en zoologie, en aurores boréales et en études autochtones nous ont offert des présentations approfondies qui ont contribué à nous faire connaître cette partie du Canada. Ils ont toujours pris le temps de répondre à nos questions pendant leurs présentations ou de façon informelle. Lors de ma première expédition dans l’Arctique, la liste des conférenciers invités comprenait Phil Fontaine, ancien Chef national de l’Assemblée des Premières Nations; Les Stroud, expert canadien en survie et animateur de la série télévisée Le survivant; et l’auteure canadienne primée Margaret Atwood, qui était venue avec sa famille.
On pense qu’il fait extrêmement froid dans l’Arctique, et c’est le cas. Prenez l’île de Baffin, par exemple : en février, le mois le plus froid, la température moyenne est de –28 ºC (–18,4 ºF). En juillet et août, cependant, il y fait « doux » avec 4,2 °C (presque 40 °F).
Il faisait tout de même froid — et humide — lorsque notre Zodiac glissait sur les vagues et se faufilait parmi les icebergs. Mais habillés de plusieurs épaisseurs de vêtements, c’est bientôt en manches courtes que nous admirions les paysages accidentés et vallonnés, et visitions les communautés accueillantes. Les bâtiments sont peints de superbes couleurs. Même si aucune raison officielle n’explique pourquoi, la plupart des gens pensent que ces teintes vives favorisent la bonne humeur pendant les longs et froids hivers.
Ici, la nature règne en maître. L’équipage de l’expédition ne pouvait donc pas garantir les itinéraires prévus ou l’observation de narvals, de baleines ou d’ours polaires, mais nous n’avons jamais été déçus. Je me demande si le bateau ne penchait pas un peu du côté où nous nous précipitions dès l’annonce dans les haut-parleurs d’une apparition d’animaux sauvages. En oubliant de quels côtés du navire se situaient tribord et bâbord, nous risquions de manquer les animaux, mais voici l’astuce pour s’en souvenir : pensez au mot « batterie » (phonétiquement « BATRI »). La syllabe « BA » à gauche dans ce mot correspond à « bâbord » alors que la syllabe « TRI » à droite correspond à « tribord ».
Je suis retournée dans l’Arctique en 2018 puis à nouveau en 2019, lorsque, avec l’aide d’un brise-glace, nous avons navigué dans le passage du Nord-Ouest, où les célèbres navires perdus de Sir John Franklin, l’Erebus et le Terror, ont été récemment découverts après avoir dormi dans la glace pendant 170 ans.
Mes prochains voyages? Je m’intéresse à une excursion en Antarctique donnée en 2022, dans le territoire des manchots. Cependant, en raison de ma loyauté envers le Canada — le meilleur endroit au monde — il se peut que je réserve à nouveau un voyage à bord du Canadien, annulé en raison de la COVID-19, qui m’emmènerait à travers les Rocheuses jusqu’à Vancouver, ou encore que je fasse le tour de Terre-Neuve sur l’Ocean Endeavour.
J’aurais dû commencer à voyager plus jeune. Il y a tellement de choses à faire et tellement d’endroits à visiter. Mais après chaque voyage, après toute l’excitation et l’activité qui l’accompagnent, j’aime toujours relire la note que j’ai accrochée derrière la porte de notre maison de ferme : « C’est chez soi qu’on est le mieux. »