par Marvin Sandomirsky (District 28 Region of Durham), tel que raconté à Martin Zibauer photographié par Jaime Hogge
J’ai enseigné les maths, l’économie, le marketing et la comptabilité. À ma retraite en 2002, j’avais 55 ans et je cherchais quelque chose d’autre à faire.
J’ai trouvé un emploi à l’aéroport Pearson de Toronto, pour conduire une navette de passagers sur le tarmac, entre les aérogares. Un an plus tard, le nombre de passagers d’Air Canada ayant fortement diminué, je me suis recyclé pour conduire un chasse-neige sur la piste d’atterrissage. C’était un environnement très stimulant où j’étais entouré d’avions, travaillant sur les pistes et autour de l’aéroport. J’ai beaucoup aimé ce travail, même si c’était tout le contraire de l’enseignement.
Mais après 15 ans, certains aspects du boulot me pesaient. Parcourir 150 kilomètres aller-retour pour le travail, rester éveillé pendant les quarts de nuit, nettoyer le chasse-neige à 3 heures du matin par une température ressentie de 30 degrés sous zéro, je me suis dit que c’était assez.
J’ai envisagé de prendre une retraite complète, mais un jour en déjeunant, j’ai mis la main sur un de ces journaux consacrés aux offres d’emplois. C’est là que j’ai vu qu’une entreprise locale recherchait un chauffeur d’autobus scolaire. Plusieurs années auparavant, alors que nous attendions notre premier enfant, j’avais temporairement conduit l’autobus scolaire de mon épouse lorsqu’elle dut s’arrêter de travailler. Je possédais donc déjà un permis de classe B, de sorte que lorsque l’entreprise m’a appelé pour m’offrir le poste, je me suis dit : « Bien sûr, pourquoi pas? ».
Je me lève à 5 h 30, plus tôt que nécessaire, pour prendre mon petit-déjeuner. Vers 6 h 30, je roule une dizaine de minutes jusqu’au stationnement des autobus, et je passe l’heure suivante à inspecter mon véhicule. C’est une obligation légale. (À la fin de chaque trajet, nous devons aussi nous assurer que des élèves ne s’y sont pas endormis – et oui, cela arrive.)
Après avoir inspecté mon autobus le matin, je fais généralement la jasette avec les autres chauffeurs, puis je me rends tranquillement jusqu’à mon premier arrêt. Mon circuit dure un peu plus d’une heure, puis je retourne stationner l’autobus. Ma matinée se termine vers neuf heures.
Je conduis environ 35 élèves du secondaire. J’ai toujours aimé enseigner à ce groupe d’âge, de sorte que cette partie de mon travail n’a pas vraiment changé. Le matin, les adolescents sont plutôt amorphes; ils discutent entre eux, mais la plupart du temps, ils restent tranquillement assis, à pitonner sur leurs téléphones.
Les élèves du primaire sont un groupe complètement différent, car ils peuvent être beaucoup plus agités et excitables. Avec ces groupes, les chauffeurs doivent déployer plus d’efforts pour que les enfants restent assis, simplement à cause de leur âge.
La plupart de mes contacts avec les élèves surviennent lorsqu’ils montent et descendent de l’autobus. Parfois, je les relance sur un commentaire que je les ai entendus faire dans l’autobus. Je peux les voir dans mon rétroviseur, mais au volant, je me concentre sur la route, bien évidemment. D’une certaine façon, je suis dans mon monde lorsque je conduis, mais jaser avec les élèves lorsqu’ils montent et descendent du véhicule est une facette des plus agréable et satisfaisante de mon travail.
Nous ne voyons pas beaucoup les parents, et les règlements de l’entreprise ne nous permettent pas d’interagir avec eux. C’est différent si vous conduisez de jeunes élèves du primaire. Au retour à la maison l’après-midi, ils doivent être accueillis par quelqu’un – souvent un parent – sinon, ils ne sont pas autorisés à descendre de l’autobus. Mais mes passagers sont essentiellement de jeunes adultes.
Le mauvais temps reste un défi, surtout les tempêtes de neige. Mais tout chauffeur d’autobus vous dira que la partie la plus effrayante de son travail est de voir les autres conducteurs faire des choses vraiment stupides – comme brûler les feux rouges et ne pas respecter les panneaux d’arrêt et parfois même presque heurter les élèves.
Je suis récemment allé au poste de police pour leur demander de surveiller un arrêt sur mon parcours où beaucoup de voitures passent quand le feu est rouge. De plus, il semble exister une loi que j’ignore et qui stipule que, dans chaque rue étroite, les voitures doivent se garer illégalement en face d’autres voitures et aussi près que possible de chaque coin de rue à 90 degrés. J’ai déjà dû frôler d’autres véhicules avec seulement quelques centimètres de chaque côté, et je tourne lentement à chaque coin de rue; une partie de notre formation nous apprend à être très conscients de la taille de notre véhicule et de la façon de le manœuvrer.
Pour beaucoup de chauffeurs, l’autobus scolaire est le premier gros véhicule qu’ils conduisent, mais les entreprises d’autobus assurent votre formation pendant que vous obtenez votre permis B. Dans les faits, vous apprenez à conduire un gros véhicule utilitaire. L’obtention du permis passe notamment par l’examen pratique, mais il reste aussi beaucoup de choses à apprendre; vous devez améliorer vos connaissances routières, apprendre à stationner votre véhicule en toute sécurité, connaître les distances à respecter pour sortir le véhicule, savoir quand et comment déployer des fusées éclairantes et tout le reste.
Conduire un autobus scolaire est un excellent emploi pour un enseignant retraité – dans les faits, la plupart des chauffeurs sont des retraités. C’est un travail à temps partiel, avec une pause en milieu de journée pour faire ses courses. Si vous êtes un enseignant qui aime vraiment les enfants, conduire un autobus vous permet de revoir des élèves et de faire partie de leur expérience scolaire, même si vous n’êtes plus en salle de classe.
Cependant, il faut aimer conduire. J’aime les voyages en voiture et j’aime conduire. Et personnellement, qu’il s’agisse de conduire un gros véhicule, de me souvenir des élèves et de leurs noms, ou d’interagir avec eux – tout cela au volant d’un autobus scolaire me permet de garder mon cerveau en forme. Cela m’occupe, et me donne un but.
LES AVANTAGES!
- Vous garderez votre cerveau en forme en manœuvrant un gros véhicule dans une circulation dense et dans des conditions hivernales, en vous souvenant de votre circuit et du nom des élèves.
- Vous aurez des relations sociales chaque jour d’école, avec des élèves et des adultes.
- Pour beaucoup de chauffeurs, le travail devient une raison de se lever le matin et une source d’intérêt.
- Vous ferez davantage de ce que vous aimez – le contact avec les élèves – sans avoir à vous préoccuper de bulletins, de plans de cours et de réunions avec les parents.
- Conduire un autobus scolaire n’est peut-être pas une activité très lucrative, mais ce travail à temps partiel peut ajouter agréablement à votre revenu de retraite.
- Ce dernier avantage est vraiment le meilleur, d’autant plus que si vous êtes devenu enseignant, c’est parce que vous aimez apprendre, vous aimez les élèves et aimez les contacts sociaux. Tout cela continue lorsque vous êtes chauffeur d’autobus scolaire, et les élèves (et souvent leurs parents) vous aimeront en retour!