Voyager pour aider les autres

Une aventure à la retraite qui a changé ma vie
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À l’automne 2003, un enseignant de notre école Saint-Martin avait invité Ted van der Zalm, cofondateur de l’association caritative Wells of Hope, à venir parler aux élèves de son expérience de forage de puits d’eau au Guatemala.

Voilà une occasion d’aventure pour ma retraite, me suis-je dit – où puis-je m’inscrire?

Le 4 octobre 2004, j’ai pris le volant d’un vieux minibus scolaire pour me joindre au convoi d’appareils de forage et de camionnettes qui ont parcouru 5 000 kilomètres entre St Catharines, en Ontario, jusqu’à Laguna del Pito, dans les montagnes près de Jalapa, au Guatemala, où nous avons installé les tentes qui seraient nos maisons pour les six prochains mois.

C’était le point de départ d’un voyage qui allait m’ouvrir les yeux, l’esprit et le cœur d’une manière que je n’avais jamais connue au cours de mes 32 années comme enseignant, directeur ou consultant.

Au début, mes responsabilités incluaient l’enseignement, le matin, à trois des enfants de Ted et l’achat de carburant pour les appareils de forage et de la nourriture pour le camp. J’avais appris un peu d’espagnol avant le départ, ce qui s’est avéré utile.

Le 14 octobre 2004, mon premier après-midi : Laguna del Pito est situé à environ 2 000 mètres au-dessus du niveau de la mer, et mes oreilles se sont débouchées trois fois lorsque je suis revenu de la ville de Jalapa avec de la nourriture et du carburant pour les appareils de forage. J’avais conduit en sens inverse dans une rue à sens unique, juste devant le poste de police. Le policier m’a simplement fait signe de reculer; pas de contravention, pas de problème.

À travers les arbres en bordure de la route, j’ai vu les maisons faites de briques séchées au soleil, la lagune où les femmes lavaient le linge et remplissaient leurs récipients en plastique d’eau potable. D’autres portant des piles de bois de chauffage sur la tête avançaient le long de la route, et des enfants déguenillés jouaient sur tous les lieux plats qu’ils pouvaient trouver.

Left: Peter Mernagh and Don Evans. Right: Peter Mernagh and Don Evans with children at an “escuelita” (school).
À gauche : Peter Mernagh (District 14 Niagara) et Don Evans; à droite : Peter Mernagh et Don Evans avec des enfants dans une « escuelita » (école).

J’ai conduit deux fois au Guatemala depuis 2004 – la deuxième fois, après l’ouragan Stan; la police nous a escortés de la frontière mexicaine jusqu’à Guatemala City parce que les ponts avaient été emportés. J’y suis allé en avion environ 25 fois. Les premières années, je passais plusieurs mois au Guatemala; plus tard, j’y allais deux fois par année et restais un mois environ. J’ai surtout voyagé avec Don Evans, un retraité de Dunnville, en Ontario. Don et moi avons fait connaissance à l’aéroport de Buffalo en novembre 2009, alors que nous allions tous deux au Guatemala. Ma femme, Irène, est venue avec moi à une occasion, mais cela ne l’inspirait pas.

Au cours des années, à mesure que Wells of Hope élargissait son rôle, mes responsabilités ont changé.

Comme mon espagnol s’améliorait, je pouvais interagir davantage avec la population locale et commencer à comprendre un peu mieux la culture Xinka. J’ai accueilli des groupes d’élèves du secondaire venus du Canada pendant l’année scolaire, accompagnés de leurs enseignants. J’ai également enseigné un peu d’anglais dans certaines écoles locales. Lorsque plusieurs médecins canadiens se sont portés volontaires pour aider, j’ai contacté l’hôpital local pour qu’ils mettent sur pied des cliniques. J’ai alors servi d’interprète et suis devenu beaucoup plus conscient des problèmes de santé de la population locale. L’incidence élevée de parasites démontrait bien le manque d’eau potable.

Nous avons commencé à construire la première des 23 écoles et en avons rénové cinq autres, afin d’offrir de meilleures installations à 5 300 élèves et à leurs enseignants. Pendant que nos bénévoles expérimentés en construction travaillaient sur les sites, je devais trouver les matériaux nécessaires.

Lorsque j’ai envoyé des photos d’écoles rudimentaires et de salles de classe en terre battue à mon ancien conseil scolaire, ils ont été heureux de donner des bureaux et des ordinateurs usagés.

Le câble de forage original apporté du Canada s’est avéré inadéquat pour forer des puits de 800 pieds dans les montagnes. En 2010, une collecte de fonds a permis d’acheter un appareil de forage beaucoup plus perfectionné. À ce jour, 32 puits sont opérationnels et desservent quelque 90 000 autochtones. Un bâtiment a été construit près du campement pour enseigner la couture, et un volet commercial a été ajouté pour les femmes désireuses de lancer des entreprises de couture. Des groupes de visiteurs venus du Canada ont aidé à construire des maisons en briques séchées au soleil pour des mères célibataires. Les initiatives en agriculture ont appris aux femmes locales à cultiver des légumes pour la vente, et leur ont fourni un espace pour cultiver des produits destinés à leurs familles.

Pendant environ sept ans, j’ai organisé des cliniques dentaires par l’entremise de Kindness in Action, un groupe de dentistes bénévoles de l’Alberta. Nous avons organisé des cliniques dentaires dans les écoles, ce qui a exigé que je travaille en étroite collaboration avec le personnel scolaire et les chefs autochtones locaux. Mon équipe de volontaires a veillé à ce que les dentistes soient nourris et le camp maintenu propre, tandis que mon ami Don s’est assuré que les génératrices électriques et les compresseurs fonctionnaient pendant ces cliniques.

Après la fin des cliniques, Don et moi avons visité certaines parties du Guatemala et du Salvador sur deux petites motos Suzuki que nous avions achetées. Voyager en moto s’est avéré une excellente façon de découvrir le pays de près et a permis des échanges intéressants avec de nombreux Guatémaltèques.

En 2018, nous avons commencé la construction dans les montagnes du premier centre médical ayant du personnel local. La COVID a entraîné quelques retards, mais en 2021 le centre est devenu fonctionnel et fournit un service indispensable à la communauté locale.

Au départ, j’étais venu au Guatemala pour vivre une aventure à la retraite. Mais j’ai vite compris que je voulais vraiment avoir la possibilité d’améliorer la vie des gens.

À gauche : Photo de Peter avec une mère et sa fille dans les montagnes; photo de la plateforme de forage utilisée au Guatemala.

J’ai pris conscience des défis de survie auxquels sont confrontés les agriculteurs de subsistance et les gens qui vivent dans les montagnes. Aucun filet de sécurité sociale, des installations médicales médiocres, presque aucune source de revenu stable, l’absence d’éducation gratuite, le manque d’eau potable, l’absence de traitement des eaux usées et ainsi de suite.

J’ai appris que ce qui est invisible à l’œil nu est plus important que ce que vous voyez au départ. Lorsque vous réussissez à surmonter les signes évidents de pauvreté, votre esprit et votre cœur s’ouvrent aux besoins de l’autre.

Pendant mes années de volontariat, j’ai rencontré des personnes incroyables qui se consacrent à aider les autres. Mon bénévolat m’a permis de donner un sens important à ma vie. J’apprécie davantage tout ce que nous tenons pour acquis au Canada, et je vois dans la vie simple des montagnards que le bonheur est possible avec des liens familiaux forts, la foi et la détermination de surmonter les défis. J’ai appris que comprendre la culture et travailler en collaboration avec la population locale est nécessaire à la réussite d’un projet.

Vous ne pouvez être que touché en apprenant le nom de personnes pauvres et leur situation familiale. Vous êtes touché de voir une situation dentaire ou médicale qui ne peut être résolue. Vous êtes touché de savoir que les écoliers sont tout aussi capables que les enfants canadiens, mais que peu d’entre eux, voire aucun, étudieront après le secondaire et auront une chance réelle d’avoir une meilleure vie que celle de leurs parents.

Ma dernière visite remonte à fin novembre 2018. Mon avion a décollé de la piste de l’aéroport international de La Aurora, et les bâtiments familiers de Guatemala City ont disparu à mesure que l’avion prenait de l’altitude; les sommets des volcans étaient encore visibles lorsque l’avion s’est dirigé vers le nord. Dans huit heures environ, je serais de retour au Canada, mais une partie de mon cœur resterait dans les montagnes prêtes à me rappeler lorsque la pandémie sera terminée.

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