Betty Ann Colquhoun (District 11, Waterloo Region) ne se considère pas comme une mentore. Elle est seulement une enseignante retraitée qui aime les langues et qui aide les étudiants du Salvador à pratiquer leur anglais pendant qu’elle-même apprend l’espagnol.
Mais « l’aide » qu’elle fournit va au-delà des rêves les plus fous de Mme Colquhoun.
Après sa retraite en 2002, Betty Ann Colquhoun s’est portée bénévole pour une organisation qui proposait l’apprentissage de l’anglais au Salvador. Lorsque l’organisation a fermé ses portes, les enfants de Mme Colquhoun l’ont incitée à prendre la relève et à poursuivre le travail. Ils ont mis sur pied CanTeach Connections (canteachconnections.org) pour fournir des partenaires linguistiques aux étudiants de ce pays.
Au total, ces interlocuteurs bénévoles ont passé plus de 800 heures en 2021 à parler individuellement aux étudiants. Grâce à leur nouvelle connaissance de l’anglais, de nombreux étudiants ont décroché des emplois sûrs et bien rémunérés dans des centres d’appels et d’autres endroits nécessitant des compétences linguistiques, et sont fiers de contribuer au revenu de leur famille.
En janvier 2022, CanTeach a ajouté un volet virtuel pour les Salvadoriens qui enseignent l’anglais. À la fin de l’année, les bénévoles avaient cumulé environ 300 heures de conversation avec eux.
« J’étais sur place en août 2022 et j’ai pris un café avec certains des enseignants, raconte Mme Colquhoun. Ils étaient déjà compétents et, à bien des égards, n’avaient pas besoin du programme, mais leur confiance s’est beaucoup accrue et c’est ce qui a fait toute la différence. Pourtant, j’ai été étonnée qu’ils me considèrent comme une mentore. »
Les mentors jouent un rôle décisif en partageant leurs connaissances, leur expérience, leurs conseils et leurs encouragements. Un mentor va souvent aider une personne possédant moins d’expérience ou plus jeune à développer et à atteindre des objectifs de carrière ou de vie. Cet accompagnement peut aussi permettre à des collègues de perfectionner leurs compétences et d’améliorer leurs performances, comme l’a fait Mme Colquhoun avec les professeurs d’anglais au Salvador.
Le mentorat peut changer des vies, soutient Mentor Canada, une coalition d’organisations offrant une démarche d’accompagnement aux jeunes au Canada. Un sondage de Mentor Canada effectué en 2021 a démontré que les jeunes bénéficiant de l’aide de mentors étaient deux fois plus susceptibles d’avoir terminé leurs études secondaires que leurs collègues sans mentor. Ils étaient 95 pour cent plus susceptibles d’avoir poursuivi leurs études et deux fois plus enclins à ressentir un sentiment d’appartenance à leur communauté.
L’Université métropolitaine de Toronto (anciennement Ryerson) a compris depuis longtemps le pouvoir des mentors, comme en témoigne son programme Tri-Mentoring (trimentorat) instauré en 2001.
« Les conseillers pédagogiques avaient constaté que certains groupes d’étudiants qui avaient été admis à l’université avaient du mal à y rester, explique Jennifer Barcelona, qui dirige le programme. Nous espérions que chaque étudiant inscrit à notre université éprouve un sentiment d’appartenance et ne soit pas contraint de laisser son identité derrière lui. »
Le programme de trimentorat associe les étudiants de trois façons différentes : le mentorat entre pairs associe les étudiants de première et de deuxième année pour faciliter la transition à l’université; le mentorat de groupe aide les Noirs, les LGBTQ2I, les Asiatiques de l’Est et du Sud-Est, les Autochtones et d’autres groupes à entrer en contact et à partager leurs expériences; quant au mentorat professionnel, il associe les étudiants de troisième année à des professionnels de l’industrie pour leur fournir un aperçu du monde du travail.
Lors de sa première année d’existence, le programme a créé 60 mentorats. Au cours des 21 dernières années, plus de 30 000 étudiants ont été ainsi encadrés.
De plus, les étudiants mentorés ne sont pas les seuls à bénéficier d’un tel accompagnement.
L’expérience du trimentorat s’est avérée tellement positive qu’au moins 80 pour cent des mentors sont eux-mêmes d’anciens étudiants mentorés. « Les diplômés de notre programme sont toujours prêts à donner de leur temps comme mentors ou conférenciers invités », explique Mme Barcelona.
Mentor Canada a aussi constaté que les jeunes ayant bénéficié de l’appui d’un mentor avaient deux fois plus tendance à être eux-mêmes intéressés par le mentorat que les autres.
Quant à Mme Colquhoun, elle ajoute « j’aime beaucoup le temps passé avec les étudiants et les enseignants au Salvador. Le travail m’a vraiment donné un objectif pendant la COVID-19, en plus de me permettre d’apprendre assez d’espagnol pour pouvoir écrire un courriel et suivre les cours en classe ».