Chaque été, RTOERO offre des bourses à des praticiens en début de carrière pour qu’ils prennent part à des stages d’été basés sur la recherche à l’Institut national du vieillissement. Il s’agit d’un engagement de 100 000 $ sur cinq ans pour le programme de bourses d’été RTOERO-NIA.
Vous vous souvenez peut-être d’Amanda Bull, doctorante en gérontologie sociale à l’Université McMaster, que nous vous avons présentée dans le numéro du printemps 2024. Amanda venait de terminer son premier stage d’été RTOERO-NIA, et l’article « Chez soi en sécurité » présentait sa recherche en vue d’un exposé de politique sur le soutien aux personnes 2SLGBTQIA+ dans les maisons de soins de longue durée.
L’été dernier, Amanda est retournée à l’Institut national du vieillissement (NIA) en tant que boursière d’été RTOERO pour un projet en partenariat avec Aide aux aînés Canada, axé sur la compréhension à l’échelle nationale du secteur des services communautaires aux aînés. En misant sur les connaissances acquises lors de son premier stage estival, Amanda a considéré ce travail comme une autre occasion d’explorer les dimensions sociales, culturelles et politiques liées au vieillissement, au-delà de ses propres recherches sur l’âgisme en milieu de travail.
Les recherches d’Amanda dans le cadre de sa maîtrise ont révélé une lacune importante : la voix des aînés est souvent absente des discussions sur l’âgisme au travail. « Mes travaux sur l’âgisme en milieu de travail m’ont amenée à constater que l’on n’implique pas de façon significative les adultes plus âgés, explique-t-elle.
Voilà pourquoi je veux privilégier leur expérience vécue et présenter ce qu’ils attendent des politiques et des pratiques de lutte contre l’âgisme de leur organisation. »L’enquête 2023 du NIA Ageing in Canada Survey a constaté qu’environ le tiers des Canadiens de 50 ans et plus ont été victimes de discrimination ou de traitement injuste en raison de leur âge à un moment ou à un autre de leur vie. Toutefois, lorsque l’on interroge les répondants sur l’âgisme vécu au quotidien, cette proportion grimpe à plus de 70 pour cent.
« Mes travaux sur l’âgisme en milieu de travail m’ont amenée à constater que l’on n’implique pas de façon significative les adultes plus âgés », explique-t-elle. — Amanda Bull
L’âgisme en milieu de travail peut être difficile à gérer, surtout lorsqu’il s’agit d’humiliations quotidiennes moins manifestes, aussi appelées « microagressions », comme les plaisanteries, les commentaires et les suppositions sur les capacités ou les habiletés des aînés. « L’âgisme en milieu de travail, tout comme l’âgisme en général, est souvent implicite, explique Amanda. Ainsi, lorsque vous demandez à une personne si elle a contacté un supérieur ou si elle en a parlé à quelqu’un, la réponse est souvent négative, justifiée par la difficulté à prouver les faits et à les étayer de preuves tangibles. »
Combien de fois avez-vous entendu dire « Vous êtes tellement vieux », d’une façon qui suggère que le fait d’être « âgé » est en quelque sorte triste ou malheureux? Quelqu’un a peut-être déjà laissé entendre que vous ne pouviez pas apprendre une nouvelle technologie ou une nouvelle compétence en raison de votre âge. Les perspectives âgistes sont normalisées dans notre société et notre culture; c’est ainsi que les préjugés peuvent être exprimés sans retenue en l’absence d’efforts intentionnels pour les prévenir. Prenons le cas de l’embauche : certaines personnes ne tiennent pas à prendre une « retraite » traditionnelle, mais beaucoup ont de la difficulté à se faire embaucher au-delà d’un certain âge, au profit de candidats plus jeunes. « Ils se situent dans cette zone grise où ils sont sans emploi; ils veulent travailler, mais ne peuvent trouver d’emploi. Ce sont des retraités qui ne veulent pas l’être », explique Amanda.
Sous-estimer les travailleurs âgés reflète un manque de vision pour de nombreuses raisons. Le vieillissement de la population fait en sorte qu’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée est annoncée. Les entreprises qui n’intègrent pas de travailleurs plus âgés risquent de sacrifier le savoir, les compétences et l’expérience, de subir une efficacité réduite et des coûts de formation accrus. Même s’il est facile de justifier le besoin de militer en faveur des employés plus âgés, il faut aussi tenir compte des droits de la personne.
Amanda ajoute que « non seulement plus d’adultes que jamais sont en bonne santé et désireux de travailler, mais en réalité, beaucoup d’entre eux ne peuvent se permettre de prendre leur retraite en raison des coûts de la vie élevés ». Dans un contexte où, chez les aînés, la pauvreté et le recours aux refuges augmentent au niveau national, nous savons que les filets de sécurité sociale ne répondent pas aux besoins de la génération actuelle d’adultes plus âgés. Pour certains, l’accès au travail se veut une question de survie.
Aucun adulte âgé ne devrait être coincé dans une situation d’emploi nuisible à sa santé, et les aînés devraient pouvoir continuer à travailler s’ils le désirent, sans subir de discrimination. C’est un avenir possible, mais qui ne se réalisera pas sans des organisations comme RTOERO et l’Institut national du vieillissement, des chercheurs comme Amanda Bull et des personnes comme vous qui font pression pour apporter des progrès.
Si vous êtes au travail, renseignez-vous sur les mesures mises de l’avant pour lutter contre l’âgisme sous toutes ses formes, et exprimez-vous si nécessaire. Partagez cet article. Et suivez le travail d’Amanda Bull : elle est déterminée à faire changer les choses.
